Nous avons des chats sur notre petite fermette, Des chats de ferme. Ils n’entrent pas à l’intérieur, ne sont pas vaccinés, traités ou stérilisés. Nous les nourrissons minimalement, toujours la même quantité qu’ils soient 10 ou 20 à venir manger. Ils sont là pour garder notre grange exempte de rats, bêtes immenses en campagne et qui décimaient notre cheptel de poulets de chair il y a quelques années.
Lors de notre retour de voyage, nous sommes allés chercher un chien, que dis-je, un bulldozer, brave mélange de Labrador chocolat et de Rottweiler. Elle était fort gentille, très musclée et grande, et en général bien élevée. Mais elle aimait bien attraper toute bête plus petite qu’elle.
Dès sa sortie du camion sur notre terrain, elle est partie à toute vitesse poursuivre nos chats qui tranquillement étaient couchés sur notre balcon. Jamais rien ne les avait menacés…jusqu’à ce jour.
Dilemme, une chatte née à notre ferme il y a environ 3 ans, une chatte qui n’a jamais su si elle devait être jaune ou brune d’où son nom, s’est fait mordre la patte arrière avant de réussir à s’enfuir.
Deux jours ont suivi où le chien nous a montré sa grande force destructrice, malgré sa gentillesse générale. Nous lui avons trouvé une nouvelle famille.
Mais pour Dilemme, il était trop tard, elle était sérieusement blessée. En fait je croyais qu’elle n’avait que l’articulation broyée et qu’elle survivrait en claudiquant. Mais j’ai su par la suite qu’il y avait bel et bien fracture ouverte de la patte arrière. Il faut se rappeler que c’est un chat de ferme, non traité. Je n’ai malheureusement aucun argent à mettre sur un chat de ferme, peu importe combien mon fils l’adore. Une opération d’une telle envergure… Plus d’un demi-millier de dollars…
Une amie de mes enfants, grande défenderesse des animaux, nous a donné le numéro de téléphone de la SPCA de Montréal, pour qui elle et son amie ont ramassé des sous antérieurement. Je ne croyais pas nécessaire d’appeler, sachant que je devrais payer et craignant que si je refusais l’opération, on m’en tienne moralement rigueur: je ne prenais pas soin de mon animal.
Mais j’ai finalement pris le téléphone et tenté un appel, me disant que cette chatte déterminée, qui avait lavé et lavé sa plaie pendant un mois au point qu’il n’y avait toujours aucune infection malgré une fracture ouverte, valait bien qu’on livre ce combat pour elle.
Et quelle ne fut pas ma surprise de constater que la SPCA avait un genre de budget d’une fondation qui pourrait servir à ce cas. Ils prenaient en charge tout: du rendez-vous d’évaluation à l’amputation, de la nuit d’hospitalisation aux antibiotiques et antidouleurs après opération. TOUT.
Le petit bémol était que nous devions la garder à l’intérieur 2 semaines pour surveiller la convalescence. Oh que j’avais peur à un enfer à vivre! Une chatte de 3 ans, qui n’a jamais utilisé une litière, qui a toujours été libre de ses allées et venues, allait vivre dans une maison avec règles de vie et litière. Tout s’est pourtant déroulé parfaitement. Elle est tellement affectueuse, colleuse, et utilise la litière sans aucun problème. Bon elle ajoute sérieusement à mes allergies, mais je m’y résigne pour l’instant, espérant m’habituer tranquillement.
Une condition à l’opération était qu’elle serait stérilisée, puisque c’est ce que prône la SPCA. C’était aussi bien ainsi si elle devait rester à l’intérieur.
Nous avons donc une chatte à trois pattes dans notre maison, toujours aussi déterminée, sautant déjà à des hauteurs incroyables. Mais parfois, triste ou drôle, elle oublie qu’elle n’a que trois pattes. Son cerveau n’arrive pas à lui faire reprendre l’équilibre. Elle retombe invariablement sur les fesses en tournant sur elle-même. Ou encore elle tombe en bas du divan en voulant se retourner sur elle-même tout en étant trop proche du bord. Des scènes dignes de Drôles de vidéos… Nous la prenons alors dans nos bras, et après quelques caresses, elle est prête à continuer sa vie de chasseresse amputée. Étrange histoire. Merci à ceux qui l’ont rendue possible.